Lucretius: The Nature of the Universe

translated by G. B. Cobbold, Bolchazy-Carducci Publishers 2016, Pb 320 pages, ISBN: 978-0-86516-828-1 ($12.00).

En guise d’avertissement au lecteur – et comme pour aiguiser sa curiosité, la préface de l’éditeur insiste en premier lieu sur la surprise et l’aventure que constitue la lecture d’une œuvre aussi bigarrée que peut l’être le De Rerum Natura (traduit en anglais par The Nature of the Universe) dans la mesure où cette œuvre antique aborde de façon combinée différents sujets tels science et poésie, religion et philosophie, le nombre et les propriétés des atomes, les héros mythologiques et les monstres, etc. Le profond et le futile se croisent et se complètent avantageusement, et ce d’autant plus que Lucrèce s’efforce de convaincre le lecteur de se libérer des peurs de la mort et de la punition qui paralysent leur vie. Cette conquête ne peut se faire que par la lumière de la rationalité, et ce dans la mesure où Lucrèce offre en pâture intellectuelle la philosophie de son prédécesseur grec Épicure. Par ailleurs, le choix de la traduction du texte de Lucrèce en prose revient au fondateur et président des éditions Bolchazy-Carducci, Ladislaus Bolchazy. Ce dernier, passionné par Lucrèce (au point de citer ses hexamètres dactyliques à visée didactique), souhaitait que chacun lise et apprécie les œuvres que lui-même appréciait. Il se sentait investi d’une sorte de popularisation responsable des auteurs classiques.

L’introduction, copieuse mais digeste (pages XV à XXVII), rappelle un certain nombre d’éléments-clefs de contexte, d’histoire, d’explicitation conceptuelle, qui participent à la bonne intelligence d’un traité qui ne saurait se comprendre sans une initiation préalable. Le lecteur non spécialiste bénéficie ainsi d’éclairages historiques, civilisationnels, biographiques, philosophiques sur le De Rerum Natura et son auteur, qui sont autant de points d’ancrage en vue d’apprécier à sa juste valeur une œuvre didactique composite. Une bibliographie sommaire ainsi que quelques illustrations légendées avec soin et souci du détail (au demeurant comme dans d’autres parties de l’ouvrage) complètent le texte introductif. Ils en constituent le prolongement référentiel et pictural.

Qu’il fréquente Lucrèce de façon assidue ou non, le lecteur appréciera la traduction en prose d’un texte rédigé en vers, qui acquiert ainsi d’autant plus de fluidité, de lisibilité qu’il est rédigé en un anglais limpide. Le texte se lit comme une histoire, celle de l’origine et du devenir du monde. Le poème se présente en effet comme une tentative de « briser les forts verrous des portes de la nature », c’est-à-dire de révéler au lecteur la nature du monde et des phénomènes naturels. Selon Lucrèce, qui s’inscrit dans la tradition épicurienne, cette connaissance du monde doit permettre à l’homme de se libérer du fardeau des superstitions, notamment religieuses, constituant autant d'entraves qui empêchent chacun d'atteindre l’ataraxie, c’est-à-dire la tranquillité de l’âme. Cette nouvelle traduction de G. B. Cobbold sous-tend avantageusement l’entreprise à la fois scientifique et philosophique de Lucrèce, et favorise l’accès au texte et donc une meilleure compréhension de ce long poème didactique.

Franck COLOTTE
(Trésorier d’EUROCLASSICA
Président de l’Association Luxembourgeoise des Professeurs de Latin et de Grec)